Theory and History of Ontology (www.ontology.co)by Raul Corazzon | e-mail: rc@ontology.co

Bernard Bolzano: Bibliographie des Études en Français

Contents of this Section

Traductions

  1. Rychlík, Karel. 1961. "La théorie des nombres réels dans un ouvrage posthume manuscrit de Bernard Bolzano." Revue d’histoire des sciences et de leurs applications no. 14:313-327.

    "La théorie des nombres réels (T.N.R.) de Bernard Bolzano fait partie de sa Grössenlehre (Théorie des quantités), laissée en manuscrit et restée inachevée. C'est principalement au cours des années 1830 à 1835, après avoir terminé son oeuvre importante sur la logique, Wissenschaftslehre (Théorie de la science), que Bolzano travaillait à cette vaste oeuvre.

    (...)

    Dans sa T.N.R., Bolzano tâche tout d'abord d'effectuer l'arithmétisation de la T.N.R., qui fut développée beaucoup plus tard de trois manières différentes par K. Weierstrass (1860), C. Méray (1869), et G. Cantor (1872), et finalement par R. Dedekind (1872). Bolzano peut être considéré à bon droit comme précurseur de ces mathématiciens: l'idée du fondement purement arithmétique des nombres réels se dessine chez lui tout à fait nettement, bien que ses considérations concernant ce sujet ne soient pas tout à fait irréprochables.

    Bolzano donne ensuite le « développement de Cantor » des nombres réels; il le prend pour point de départ pour déduire les propositions ultérieures concernant les nombres réels; la trichotomie des relations « plus grand » et « plus petit », le théorème d'Archimède (Eudoxe), le théorème de Cauchy-Bolzano, le théorème de Bolzano-Weierstrass et finalement un théorème qui rappelle le théorème de Dedekind. Ces considérations pourraient, sans grands changements, être amenées à la précision requise de nos jours. Ce manuscrit de Bolzano publié, même en son état actuel, aurait pu accélérer considérablement le progrès des mathématiques.

    La Ire Partie du présent article contient un Abrégé du manuscrit de la T.N.R.

    Dans la IIe Partie intitulée « Conclusion », je tâche de corriger et de compléter l'oeuvre de Bolzano.

    La IIIe Partie comprend la Bibliographie." (pp. 313-314).

  2. Sebestik, Jan. 1964. "Bernard Bolzano et son mémoire sur le théorème fondamental de l’Analyse." Revue d’Histoire des Sciences no. 17.

    Traduction de Rein analystischer Beweis der Lehrsatzes (1817) avec le titre: Démonstration purement analytique (pp. 136-164).

    Repris dans B. Bolzano, Premiers écrits. Philosophie, logique, mathématique, pp. 209-243.

  3. Bolzano, Bernard. 1975. Qu'est-ce que la philosophie? Québec: Presses de l'Université de Laval.

    Rédigé en 1839; traduction et commentaire par Denis Macabrey.

  4. ———. 1987. "De la mathématique universelle ou arithmétique." Archives de Philosophie no. 50:403-411.

    Traduction et commentaire de Jan Sebestik.

    Repris dans B. Bolzano, Premiers écrits. Philosophie, logique, mathématique, pp. 259-261.

  5. ———. 1990. "Sur la doctrine kantienne de la construction des concepts par les intuitions." Philosophie no. 27:3-12.

    Traduction de l'Appendice à Contributions zu einer begründeteren Darstellung der Mathematik (1810) par Jacques Laz; repris dans: J. Laz, Bolzano critique de Kant, Paris, Vrin, 1993, p. 161-82.

    Version revue et corrigée dans B. Bolzano, Premiers écrits. Philosophie, logique, mathématique, pp. 131-138.

  6. ———. 1992. "Introduction à la théorie des grandeurs et Wissenschaftslehre." In Logique et fondements des mathématiques. Anthologie (1850-1914), edited by Rivenc, François and de Roulhan, Philippe, 15-28. Paris: Payot.

    Traduction et commentaire de Jan Sebestik.

  7. ———. 1993. Le paradoxes de l'infini. Paris: Seul.

    Traduction de Hourya Sinaceur.

  8. Prihonski, Franz. 2006. Bolzano contre Kant. Le Nouvel Anti-Kant. Paris: Vrin.

    Introduit, traduit et annoté par Sandra Lapointe.

  9. Bolzano, Bernard. 2008. De la méthode mathématique et Correspondance Bolzano - Exner. Paris: Vrin.

    Œuvres choisies I.

    Traduction coordonnée par Carole Maigné et Jan Sebestik.

  10. ———. 2010. Premiers écrits. Philosophie, logique, mathématique. Paris: Vrin.

    Œuvres choisies II.

    Édition coordonnée par Carole Maigné et Jean Sebestik.

  11. ———. 2012. "Du concept du beau, § 37-40." In Formalisme esthétique Prague et Vienne au XIXe siècle, edited by Maigné, Carole, 57-73. Paris: Vrin.

    Traduction par Carole Maigné et Gaëtan Pégny de Über den Begriff des Schöen, BGA I 18, pp. 87-238, (§ 37-40).

  12. ———. 2015. "Textes choisis sur les domaines des sciences, l’intuition et la théorie du langage." Philosophie no. 2:12-21.

    Traduit et présenté par Alain Gallerand.

Bibliographies

  1. Lapointe, Sandra. 2003. "Bibliographie." Philosophiques:235-243.

    "Cette bibliographie a pour but de faire le point sur les études bolzaniennes de langue française et d’orienter le lecteur à travers la littérature sur le sujet.

    Nous y faisons l’inventaire des articles et monographies francophones portant sur Bolzano — dont le nombre, comme on aura tôt fait de le constater, reste regrettablement marginal. Le lecteur y trouvera également la liste des traductions françaises publiées ou projetées des oeuvres de Bolzano. Nous incluons les monographies et les traductions anglophones les plus importantes et nous fournissons le descriptif du projet d’édition des OEuvres complètes (Bernard Bolzano-Gesamtausgable) de même que la liste des ouvrages parus en allemand et en anglais dans la série Contributions aux recherches bolzaniennes (Beiträge zur Bolzano-Forschung). Pour un complément à cette bibliographie, on consultera Sebestik (1992). Le nombre de publications en allemand et en anglais est plus considérable. On consultera à ce sujet les volumes 2 et 10 des Beiträge zur Bolzano Forschung." (p. 235)

    References

    Sebestik, Jan, Logique et mathématique chez Bernard Bolzano, Paris, Vrin, 1992.

Études (A - L)

  1. "Bernard Bolzano." 1999. Revue d'Histoire des Sciences no. 52:339-506.

    Numéro spécial consacré à la mathématique et à la logique chez Bolzano, rassemblant les contributions suivantes en français :

    Hourya Sinaceur: Mathématique et logique chez Bolzano. Introduction 339-341; Hourya Sinaceur: Réalisme mathématique, réalisme logique chez Bolzano 457-477; Jan Sebestik: Forme, variation et déductïbilité dans la logique de Bolzano 479-506.

  2. "Bernard Bolzano." 2000. Les Études Philosophiques no. 4:433-534.

    Sous la direction de Jocelyn Benoist.

    Table des matières: Jocelyn Benoist: Présentation 433; Mark Textor: Bolzano et Husserl sur l'analyticité 435; Sandra Lapointe: Analyticité, universalité et quantification chez Bernard Bolzano 455; Claudio Majolino: Variation(s) I. Bolzano et l'équivocité de la variation 471; Ali Benmakhlouf: La proto-sémantique de Bolzano 489; Jocelyn Benoist: Pourquoi il n'y a pas d'ontologie formelle chez Bolzano 505; Jacques Bouveresse: Sur les représentations sans objet 519-534.

  3. "Bernard Bolzano : Philosophie de la logique et théorie de la connaissance." 2003. Philosophiques no. 30.

    Sous la direction de Sandra Lapointe.

    Index: Sandra Lapointe: Introduction: Bernard Bolzano: contexte et actualité 3; Rolf George; Intuitions 19; Jan Sebestik: La dispute de Bolzano avec Kant: fragment d'un dialogue sur la connaissance mathématique 47; Paul Rusnock: Qu'est-ce que la représentation? Bolzano et la philosophie autrichienne 67; Benjamin Schnieder: Bolzano sur la structure des propositions et le rôle sémantique des propriétés 83; Mark Textor: Bolzano sur le temps et la persistance 105; Peter Simons: Bolzano sur les nombres 127; Jocelyn Benoist: Propriété et détermination: Sémantique et ontologie chez Bernard Bolzano 137; Edgar Morscher: La définition bolzanienne de l'analyticité logique: 149; Mark Siebel: La notion bolzanienne de déductibilité 171; Armin Tatzel: La théorie bolzanienne du fondement et de la conséquence 191; Jacques Dubucs et Sandra Lapointe: Preuves par excellence 219; Sandra Lapointe: Bibliographie 235-243.

  4. Benmakhlouf, Ali. 2000. "La proto-sémantique de Bolzano." Les Études Philosophiques 489-504.

    "Le projet de B. Bolzano, « le Leibniz de la Bohême », est de considérer comme une des tâches de sa vie le fait d’« endiguer l’épouvantable désordre que Kant, sans le présumer lui-même, a occasionné par ses philosophèmes en Allemagne »(2). Husserl lui rend hommage dans les Prolégomènes à la logique pure : « C’est sur l’ouvrage de Bolzano [la Wissenschaftslehre], que la logique doit s’édifier comme science »(3), car ce nouveau Leibniz a su mettre la philosophie sur le chemin d’un « savoir théorique analytique universel » sans l’obstruer de « vision du monde ou de sagesse universelle », équivoque préjudiciable au progrès philosophique. Deux perspectives vont retenir ici notre attention :

    1 / Dans les Contributions à une exposition des mathématiques sur de meilleurs fondements, texte de 1810, Bolzano invalide l’existence de l’intuition pure en nous montrant que c’est là une notion contradictoire. Kant était parti des mathématiques pour élaborer cette notion, c’est des mathématiques que vient aussi la critique. Les propositions arithmétiques n’empruntent rien à l’intuition et sur cette base minent le fondement épistémologique kantien.

    2 / Autre chantier ouvert : la distinction entre ordre en soi de la vérité et ordre pour nous ; seul le premier ordre est objet de la science. Il faut rompre avec l’idée d’une connexion étroite entre l’indémontrabilité et l’immédiateté. L’immédiat pour nous, donné par l’intuition ou l’évidence ne relève pas de l’indémontrable, qui est toujours en soi et indépendant de nous. Les critères de l’indémontrable sont la simplicité et la justification, ceux de l’immédiateté sont l’intuition et l’évidence, nous avons là deux régimes totalement différents de la connaissance. Par là même la coïncidence kantienne entre l’acte de conscience et le formel auto fondateur de l’accord de la connaissance avec elle-même est non seulement inutile mais nuisible, comme l’a montré J. Cavaillès (4)." (p. 491)

    (2) Testament de Bolzano, cité, in Laz, Bolzano critique de Kant, Vrin 1991, p. XIII.

    (3) Husserl, Prolégomènes à la logique pure, tr. fr., PUF, p. 248-259.

    (4) Kant avait souligné le fait que la logique générale faisait abstraction de tout contenu de la connaissance, c’est-à-dire de toute relation de celle-ci à un objet, nous sommes en droit de nous demander si cette abstraction est possible, si, comme le note J. Cavaillès, l’ « abstraction qui donne le logique étant radicale », nous ne tombons pas finalement dans le « vide »; «ni du côté matière, puisqu’elle porte sur l’indéfini “tout objet”, ni du côté forme, elle ne s’accroche à une qualification positive ». La question de Cavaillès à Kant est alors la suivante: «Que tirer de l’exigence d’accord de la pensée avec elle-même sinon l’éternelle répétition » ? (...) « Pour que l’accord revêtit un sens plein, il faudrait qu’il y eut au moins une différenciation à l’intérieur de la pensée, que l’occasion du désaccord possédât déjà un contenu, mais la logique serait alors logique transcendantale ou dialectique » (in Sur la logique et la théorie de la science, p. 6, Hermann, 1994).

  5. Benoist, Jocelyn. 1997. "De Kant à Bolzano : Husserl et l'analyticité." Revue de Métaphysique et de Morale:217-238.

    Repris dans : J. Benoist : Phénoménologie, sémantique, ontologie. Husserl et la tradition logique autrichienne, Paris: P.U.F., 1997 avec le titre : L'héritage de Bolzano : l'analytique formel, pp. 59-81.

    "Donner une définition correcte de l'analyticité exige d'abord l'abandon de l'approche« subjective»(1) de ce phénomène induite par les formulations kantiennes. Tant qu'on en reste à la question de savoir si le prédicat était ou non« pensé dans le sujet», il est malaisé de séparer le fait et le droit et de donner une détermination précise au problème.

    Qu'est-ce en effet qu'être pensé ou non dans un concept? A l'analyse il devient évident que le problème ne peut pas se réduire à celui de savoir si la représentation avancée comme prédicat était ou non contenue dans ma représentation du sujet. L'analyticité, si elle a un sens, est un fait objectif, qui concerne la structure même de ce à quoi je suis confronté dans mon jugement, la vérité de ce jugement, et non le« contenu» de mes représentations. Distinguer l'analytique et le synthétique, c'est départager des conformations de jugement, en tant que celles-ci définissent des formes différentes pour les objets eux-mêmes (des types d'« objectivité» différents). D'une certaine façon, par là même, l'analyticité (ou son contraire) n'est plus à chercher nulle part ailleurs que dans la proposition elle-même, fût-elle idéalisée - comme c'est le cas chez Bolzano - et non dans les« représentations» (au sens de représentations du sujet) qui y sont associées.

    La percée décisive est accomplie par Bolzano lorsqu'il développe au § 148 de la Wissenschaftslehre une théorie originale de l'analyticité, fondée sur le concept leibnizien de substituabilité." (pp. 64-65, une note omise)

    (1) Comme c'est le reproche général adressé à Kant par Bolzano. Cf. la présentation de Jacques Laz, Bolzano critique de Kant, Paris, Vrin, 1993.

  6. ———. 1999. L'a priori conceptuel. Bolzano, Husserl, Schlick. Paris: Vrin.

    "Pour Bolzano, toute proposition est essentiellement composition (Zusammensetzung) de représentations(2), qui sont pour elles de véritables parties(3). À partir de là, on peut envisager la variation (Veränderung) de certaines de ces parties. Est analytique une proposition qui conserve la même valeur de vérité quelque représentation que l’on substitue à un ou plusieurs éléments représentationnels distingués en elle (i, j, ...)(4). Cette définition, qui se rattache aux recherches leibniziennes sur la substituabilité plus qu’à Kant, est extraordinairement souple : il suffit qu’un seul élément représentationnel (sémantique) de la proposition soit librement modulable salva veritate pour la proposition pour qu’elle soit tenue pour analytique. De ce point de vue la définition bolzanienne, tout à la fois objective (sémantique) et pragmatique (elle est adossée à la simple possibilité d’une transformation opérée sur la proposition) déborde largement le cas de la seule analyticité logique - celui qui intéressera Husserl aussi bien. Il est vrai que Bolzano admet aussi une analyticité au sens strict, qu’il nomme « analyticité logique »(5) : celle-ci se caractérise par le fait que dans la proposition qui est analytique en ce sens-là, tout peut faire l’objet de substitution, sauf des concepts «qui appartiennent à la logique ». On aboutit alors à une entente de l’analyticité en son sens radical qui est celle où la valeur de vérité de la proposition n’est plus tributaire que de son armature logique, de ce que Husserl appellera les «concepts formels»(6) qui y interviennent. Cette analyticité bolzanienne fixe, à quelques réserves près sur lesquelles nous reviendrons, le cadre de l'analyticité husserlienne." (pp. 98-99)

    (2) Wissenschaftslehre, § 123, Bd. Il, p.4 sq. Nous entendons évidemment ici par « représentation » (Vorstellung), la « représentation en soi » en son sens d’unité sémantique de base (cf. Wissenschaftslehre, § 48, Bd. I, p. 215 sq.).

    (3) Sur le sens de cette méréologie, qui constitue une extension de celle constitutive de la représentation elle-même, voir le § 56, Bd. l, p. 243 sq. On notera l’absence de distinction méréologique entre la logique qui gouverne la composition, à base de représentation» simples, des «représentations composées » et celle qui gouverne la composition, à partir d’elles, de «propositions » (qui sont essentiellement constituées de représentations), Elle aura une certaine importance pour notre propos ultérieur.

    (4) Wissenschaftslehre, § 148, Bd. II, p. 83. Sur ce qui suit, voir notre exposé dans Phénoménologie, sémantique, ontologie, chap. II, p. 65 sq.

    (5) Wissenschaftslehre, § 148, Bd. II, p. 84.

    (6) Recherches logiques III, § 11, tr. fr. p. 35.

  7. ———. 1999. "Bolzano, Husserl et l'idée de grammaire." Les Études Philosophiques:521-534.

    Repris dans : J. Benoist, Entre acte et sens. Recherches sur la théorie phénoménologique de la signification, Paris: Vrin, 2002, avec le titre : Grammaire ou méréologie des représentations, pp. 33-48.

    "Au paragraphe 56 de la Wissenschaftslehre, Bolzano avance un principe de compositionnalité (Zusammengesetztheit) des représentations en soi, principe à l’appui duquel il invoque l’expérience phénoménologique de la «représentation pensée », que d’autres textes spécifient comme le corrélat subjectif de la représentation en soi (1): « notre conscience nous enseigne en effet que nous distinguons presque dans chacune des représentations pensées certaines parties, dans la liaison desquelles elle consiste » (2).

    L’articulation du langage en mots porte également témoignage d’une telle composition : la simple pluralité des mots employés pour restituer la signification de telle ou telle expression peut renvoyer à la complexité de la représentation, même s’il n’est pas dit, contrairement à ce que pourraient suggérer certaines analyses de Bolzano, qu’elle la réfléchisse exactement (3).

    Bolzano a un mot pour désigner la teneur méréologique de la représentation, c’est-à-dire la « somme » de ses parties : le contenu (Inhalt) de la représentation, le mot que Kant utilisait pour désigner son intension (par opposition à son extension). « Somme » (Summe) doit ici être entendu en un sens bien particulier: la somme n’est rien d’autre qu’un ensemble dans lequel une sous-partie d’une partie est encore une partie de l’ensemble (4), et nullement une opération. Cette définition ne comprend aucune contrainte d’ordre: on a en quelque sorte ici affaire aux constituants de la représentation « en vrac ». C’est ce qui constitue son « contenu », autant dire son matériau méréologique. On est donc très loin de la teneur intensionnelle de l' Inhalt au sens kantien du terme.

    Bolzano le souligne lui-même :

    Comme, par ce contenu, on n’entend que la somme des constituants dont est constituée la représentation, mais non la façon que ces parties ont d’être liées ensemble, une représentation n’est donc pas encore entièrement déterminée par l’indication de son contenu, mais, à partir d’un contenu univoquement donné, on peut parfois obtenir deux (ou plus) représentations différentes (5)." (pp. 35-36)

    (1) Cf. Wissenschaftslehre, Sulzbach, 1837, § 48, l’opposition entre la « représentation eue » ou « pensée » et la « représentation en soi ». Le même paragraphe, Bd. I, p. 217, précise qu’à toute représentation subjective correspond une représentation en soi, qui constitue sa matière (Stoff) et pour ainsi dire sa teneur sémantique. Le § 52, p. 228 sq., nous met toutefois en garde contre l’idée d’une corrélation nécessaire de l’une à l’autre, car elle reviendrait à prendre la représentation en soi au piège d’un rapport qui lui demeure extrinsèque.

    (2) Wissenschaftslehre, § 56, Bd. I, p. 243. En fait, les deux « remarques » jointes à ce paragraphe, p. 244-246, apportent immédiatement des restrictions à cette transposition du plan subjectif de la représentation au plan objectif: il peut y avoir dans la représentation en soi des parties qui ne sont pas représentées distinctement dans la représentation subjective, voire qui n’y sont pas représentées du tout, de même qu’une partie peut très bien être représentée dans la représentation subjective sans que rien lui corresponde dans la représentation en soi. Il n’y a pas d’isomorphie de l’une à l’autre, mais juste extension d’un seul et même principe de compositionnalité.

    (3) La bonne articulation de la représentation serait à trouver au niveau du sens de l’expression, dont la forme linguistique apparente ne reproduit pas forcément la structure. Nous renverrons ici aux réflexions de notre amie Sandra Lapointe sur la notion de paraphrase à introduire chez Bolzano.

    (4) Cf. Wissenschaftslehre, § 84, Bd. I, p. 400.

    (5) Wissenschaftslehre, § 56, Bd. I, p. 244.

  8. ———. 2000. "Pourquoi il n'y a pas d'ontologie formelle chez Bolzano." Les Études Philosophiques 505-518.

    Repris dans : J. Benoist, Entre acte et sens. Recherches sur la théorie phénoménologique de la signification, Paris: Vrin, 2002, pp. 49-65.

    "Pourtant, y a-t-il une véritable « ontologie formelle » chez Bolzano? Cette notion même peut-elle avoir un sens dans le contexte de pensée qui est le sien?

    On peut rappeler ici la mise en garde de Husserl dans Logique formelle et logique transcendantale. Bolzano n’aurait « pas vu la distinction entre la forme vide du quelque chose en général prise comme genre suprême qui se différencie en tant que forme formelle vide et la région universelle de l’existant (Daseiendes) possible (du réel [des Realen] au sens le plus large), région qui se différencie en régions particulières »(2).

    Dans son livre sur l’ontologie formelle, Frédéric Nef écrit qu’un tel reproche est « plus intéressant pour la conception qu’il trahit de l’ontologie formelle que pour ce qu’il dit de Bolzano »(3). Et il est vrai qu’une telle critique réfléchit certainement la conception que Husserl se fait de l’ontologie formelle. Pour autant est-elle injustifiée, et ne nous dit-elle rien sur Bolzano? Nous n’en sommes pas sûr. Tout à la fois nous ne sommes pas certains, quant à nous, que Husserl ait raison dans le débat qui l’oppose ici à Bolzano: c’est-à-dire sur le point de savoir s'il faut une ontologie formelle, ou en tout cas si celle-ci peut avoir une portée autre que locale (et rendre compte, par exemple, d’autre chose que des seuls mathematica). Mais nous pensons qu’en revanche Husserl a raison sur un point historique : le diagnostic de l’absence d’ontologie formelle chez Bolzano précisément, et cela en tout sens - et non seulement au sens de Husserl. Sur ce point, Husserl, fin historien de la philosophie à ses heures, nous apprend plus sur Bolzano que les reconstructions modernes. Tout le problème est alors de ré-apprécier la position de Bolzano, dans son originalité bien détectée par Husserl, avec d’autres yeux que ceux de Husserl." (pp. 505-506).

    (2) Logique formelle et logique transcendantale, tr. fr. Suzanne Bachelard, Paris, PUF, 1957, § 26d p. 117.

    (3) L’objet quelconque. Recherches sur l'ontologie de l'objet, Paris, Vrin, 1998, p. 124.

  9. ———. 2000. "Husserl entre Brentano et Bolzano : jugement et proposition." Manuscrito no. 23:11-39.

    Résumé : "Il est bien connu que, dans la Ve Recherche Logique, Husserl critique la théorie brentanienne du jugement. Son problème est de définir le “porteur” de vérité auquel le jugement donne une valeur de vérité. Un tel projet le conduit très près du propositionalisme bolzanien. Alors la théorie phénoménologique du jugement apparaît comme une sorte de compromis entre la psychologie brentanienne de l’acte

    et un point de vue purement sémantique hérité de Bolzano. La question demeure de savoir si une telle conciliation est possible sans un tournant transcendantal."

  10. ———. 2001. Représentations sans objet. Aux origines de la phénoménologie et de la philosophie analytique. Paris: Presses Universitaires de France.

    Chapitre 1: Bolzano et le paradoxe des objets inexistants, pp. 17-41.

    "Il faut rappeler ici brièvement les présupposés qui sont ceux de la Wissenschaftslehre en ce qui concerne la notion de « représentation ». Lorsque, dans la Doctrine des éléments de la Wissenschaftslehre, Bolzano parle de « représentations en soi », il s’agit de ce qu’on pourrait appeler la teneur sémantique de la représentation, et dont le modèle est clairement celui, linguistique, d’unités de sens correspondant aux différents mots, même s’il demeure extrinsèque à ce sens d’être effectivement proféré ou non, et d’apparaître dans un éventuel discours — il lui est en tout cas, si c’est possible, encore plus extrinsèque d’être effectivement représenté ou non (en un sens psychologique) par un sujet. Il s’agit en premier lieu d’une dépsychologisation de la représentation — dont la détermination traditionnelle, mentale, est ravalée au rang de seule représentation « subjective », la « représentation en soi » se voyant aussi, par contraste, qualifiée de « représentation objective». Toute représentation subjective contient comme son sens (sa « matière » : Stoff) une représentation en soi ou objective, qui, en raison même de son statut sémantique, a une dimension d’idéalité, et est indépendante des fluctuations de la subjectivité représentante. Inversement, il n’est pas dit qu’à toute représentation objective doive correspondre une représentation subjective dans laquelle elle viendrait s’incorporer et qui, en quelque sorte, la supporterait. Bolzano dit même très expressément le contraire, et il faut faire droit (ratification ultime de la thèse d’idéalité de la représentation objective) à la possibilité de représentations en soi qui n’auraient pas de manifestation subjective, c’est-à-dire ne seraient représentées ni énoncées par qui que ce soit (1).

    Or, parmi les représentations entendues en ce sens-là, sémantique et objectif, il en est qui sont sans objet. C’est l’objet du célèbre § 67 de la Wissenschaftslehre." (pp. 17-18)

    (1) Cf. la très importante mise au point n° 2 du § 52 de la Wissenschaftslehre, Bd. I, p. 228 (contre Briefwechsel mit Exner, lettre à Exner du 23 août 1833, p. 86-87: « A chaque représentation objective correspond une représentation subjective qui lui appartient, qui est sa conception (Auffassung). »). Là sans doute on trouverait la limite du rapprochement de la doctrine bolzanienne de la représentation subjective et de la représentation objective et de la doctrine husserlienne de la corrélation noético-noématique — ou plus exactement phansio-ontique, sur le terrain de la doctrine de la signification (cf. Husserl, Sur la théorie de la signification, § 8 b, p. 62). On notera par ailleurs que l’entendement divin sert toutefois alors à Bolzano, de façon traditionnelle, à supporter dans sa pensée les « représentations en soi »: cf. la réserve de la fin du § 48 de la Wissenschaftslehre, Bd. I, p. 218 : «Il peut y avoir des représentations objectives qui ne sont reçues dans la conscience d’aucun être pensant — à l'exception de Dieu » (nous soulignons). Mais Bolzano précisera aussi qu’une telle incarnation est inessentielle à ladite représentation.

  11. ———. 2002. Entre acte et sens : recherches sur la théorie phénoménologique de la signification. Paris: Vrin.

    Première partie : L'univers du sens: Bolzano; Chapitre I: Grammaire, ou méréologie des représentations 33; Chapitre II: Pourquoi il n'y a pas d'ontologie formelle chez Bolzano 49; Chapitre III: Sens et non-sens 67-86 [inédit].

    "De fait, il y a bien une théorie des impossibilia dans la Wissenschaftslehre de Bolzano. Et cette théorie témoigne d’intéressantes similarités, aussi bien que des différences, avec la théorie supposée de Wittgenstein.

    Du point de vue de Bolzano, ce problème relève de ce cercle de problèmes connu sous le nom de: représentations sans objet (gegenstandlose Vorstellungen).

    Qu’est-ce qu’une représentation sans objet? Et, en premier lieu, qu’est-ce qu’une représentation?

    Sous les termes «représentations en soi » et «propositions en soi », Bolzano vise ce qu’on pourrait appeler des entités sémantiques, qui relèvent d’une théorie de la signification.

    La seconde classe de ces entités, les propositions en soi, est construite sur la première. Les propositions en soi sont des combinaisons de représentations en soi.

    Pourtant, jusqu’à un certain point, dans l’œuvre de Bolzano, les représentations en soi sont déterminées exclusivement en référence aux propositions en soi, qui semblent avoir une sorte de priorité logique. La seule caractérisation que Bolzano semble être capable de donner des dites représentations en soi est que ce sont des parties de propositions en soi (les parties de ces entités porteuses de valeur de vérité que sont les propositions qui ne sont pas encore elles-mêmes porteuses de valeur de vérité).

    Les propositions en soi étant définies comme des combinaisons de représentations en soi qui, en tant que combinaisons, ont une valeur de vérité, il semble qu’il y ait là comme un cercle vicieux.

    Remarquons cependant que Bolzano, au paragraphe 52-1 de la Wissenschaftslehre, insiste sur le fait que la caractérisation (il s’agit tout au plus d’une explication élucidatrice, ce que Bolzano appellerait une Verstândigung, qui aide à cerner le sens d’un terme, et aucunement d’une définition) de la représentation en soi comme partie de la proposition en soi, partie qui n’a pas encore elle-même de valeur de vérité, est seulement extrinsèque, et nullement essentielle. En réalité, le réalisme sémantique strict qui est le sien conduit Bolzano à considérer que les représentations en soi précèdent leur possible combinaison, et sont, dans leur sens (dans le fait d’avoir un sens pour elles, et dans le contenu de celui-ci), indépendantes de celle-ci. Tout comme les combinaisons dont il est question (id est les propositions en soi, dans le cas où ces combinaisons ont une valeur de vérité) consistent également en elles-mêmes, dans une sorte d’objectivité, indépendamment de tout acte subjectif de combiner." (pp. 68-69)

  12. ———. 2002. "La réécriture par Bolzano de l'Esthétique transcendantale." Revue de Métaphysique et de Morale:287-303.

    Résumé : "L' Elementarlehre de la Wissenschaftslehre de Bolzano peut être lue comme une sorte de réécriture de l' Elementarlehre de la Critique de la raison pure. Bien sûr, on pourrait avoir l'impression que toute Esthétique Transcendantale fait ici défaut. Des déterminations qui sont supposées intuitives chez Kant sont réinterprétées par Bolzano comme purement conceptuelles. Pourtant, en fait, développant sa propre Esthétique Transcendantale du point de vue d'une sémantique objective, Bolzano invente une nouvelle sorte d'a priori pour la sensibilité - précisément un a priori purement conceptuel."

  13. ———. 2002. "Bolzano et l'idée de Wissenschaftslehre." In Les philosophes et la science, edited by Wagner, Pierre, 659-678. Paris: Gallimard.

  14. ———. 2003. "Propriété et détermination: sémantique et ontologie chez Bernard Bolzano." Philosophiques no. 30:137-148.

    Résumé : "L’auteur essaie de circonscrire la sphère du «métaphysique » dans la pensée de Bolzano. Il montre comment la métaphysique de la réalité (Wirklichkeit), avec ses deux ingrédients: les substances et les propriétés (Beschaffenheiten), doit être distinguée de la doctrine du règne « sémantique » (celui des représentations et des propositions en soi). Ces dernières entités n’appartiennent pas à la sphère de l’ontologie, et il est impossible de trouver quelque chose comme une « ontologie formelle » chez Bolzano qui serait en charge de s’occuper d’elles, c’est-à-dire une doctrine qui les traiterait comme des « êtres ». L’auteur s’intéresse, de ce point de vue, à la distinction importante faite par Bolzano, entre les propriétés (Beschaffenheiten), qui doivent être prises en un sens ontologique, et les déterminations (Bestimmungen) qui, bien que rapportées à des objets et éventuellement des êtres, n’ont pas de sens indépendamment d’un discours tenu sur ces objets, et ne sont pas des entités ontologiques à proprement parler. Ainsi, l’auteur essaie de mettre en lumière la complexité des relations entre le plan sémantique et le plan ontologique chez Bolzano: les deux plans doivent être soigneusement distingués, et pourtant demeurent aussi corrélés en un sens complexe."

  15. Bouveresse, Jacques. 2000. "Sur les représentations sans objet." Les Études Philosophiques no. 4:519-534.

    "Un point crucial de la théorie bolzanienne de la représentation est qu'une représentation doit avoir dans tous les cas un contenu ou plus exactement, pour respecter la terminologie de Bolzano, une matière, mais pas necessairement un objet. Quand on dit d'une représentation subjective qu'elle a un contenu, on veut dire qu'une représentation objective lui est coordonnée. Une représentation contradictoire ne peut pas avoir d'objet; mais il n'en resulte pas que nous ne puissions pas la penser; et, lorsque nous la pensons, nous appréhendons nécessairement une représentation objective. Nous avons des représentations de cette sorte toutes les fois que nous entendons des représentations verbales comme un carré rond, un pentaèdre regulier, etc. «Car sans cela, remarque Bolzano, on devrait dire que ce que nous pensons avec des représentations de cette sorte est ou bien rien du tout ou bien pas plus que ce que nous pensons avec le mot entièrement denue de sens "abracadabra". Mais le fait que nous formulions des propositions comme: "II ne peut pas y avoir un pentaèdre regulier, un carré negatif' comme des verités et qu'acquerir une compréhension de ces verités exige que nous considerions en chacune d'elle son propre objet, celui de la première etant entièrement différent de celui de la deuxième, nous démontre déjaàqu'il n'en est pas ainsi.» (Wissenschaftslehre, § 70)." (p. 519)

  16. Brisart, Robert. 2002. "Husserl et Bolzano : le lien sémantique." Recherches Husserliennes no. 18:3-29.

  17. Candiotto, Maurizio. 2012. "Représentations sans relation : Bolzano et Frege." Esercizi filosofici no. 7:20-32.

    English abstract: "In comparing Frege’s sense (Sinn) with Bolzano’s representations in themselves (Vorstellungen an sich) pivotal is the role of variation, a procedure which both philosophers use to define their respective notions of the objective content (or, rather, the direct object) of thought. The uses they make of such procedure, however, are utterly different : for Bolzano resistance to variation is essential to all representations in themselves, simply as such, while for Frege it is the hallmark of (both the reference and) the sense of unsaturated expressions only, the saturated ones being rather extraneous than resistant to variation. However, the two notions they respectively define by means of variation are not barely incommensurable: there is a matter between them. Moreover, in each of the two philosophers variation – and therefore thought – implies drawing a profile of the entire world. Be it by predicating or even simply by representing, thinking implies outlining nothing less than the entire world. Both in Frege and Bolzano variation can be traced forward to what will be, in the XX century, one of the roots of transcendental philosophy."

  18. Cantù, Paola. 2006. "Bolzano et les propositions en soi : une théorie objective des vérités." In Propositions et états de choses. Entre être et sens, edited by Benoist, Jocelyn, 51-66. Paris: Vrin.

    "Bernard Bolzano présente sa théorie logique des propositions en soi dans les deux premières parties de sa Wissenschaftslehre, publiée en 1837, mais quelques aspects sont déjà traités dans un échange épistolaire avec Exner daté de 1834 et dans les Beyträge zu einer begründeteren Darstellung der Mathematik de 1810: ce dernier texte montre que l’intérêt de Bolzano à la connaissance scientifique et à l’étude de la logique est étroitement lié à la recherche mathématique (1).

    Avant d’exposer les différences entre propositions en soi et états des choses et avant d’expliquer les raisons et les conséquences de cette opposition, j’esquisserai quatre traits fondamentaux de la logique bolzanienne: la définition et la fonction des propositions en soi et des représentations en soi, le propositionalisme, qui dans la théorie de la signification attribue le rôle le plus important aux propositions, la nature des relations entre représentations subjectives, objectives et objets, la conception sémantique de la vérité (2).

    Parallèlement je mentionnerai quatre conceptions que Bolzano critique vigoureusement: le psychologisme, l’interprétation intentionnelle des représentations en soi, le concept traditionnel de adequatio entendu comme ressemblance entre concepts et objets, l’idée que tous les concepts doués de sens ont un objet, soit réel soit irréel.

    L’analyse des fondements de la théorie logique de Bolzano nous permet de remarquer:

    – que la théorie de la vérité n’est pas une théorie de la correspondance en tant que adequatio entre idées et objets;

    – que les propositions en soi sont ce qui porte la valeur de vérité (truthbearers) et donc ne jouent pas le rôle d’état de choses, de quelque façon qu’on l’entende;

    – que la logique bolzanienne peut être définie un platonisme logique, seulement dans la mesure où elle refuse une conception épistémique de la vérité, et qu’il est de toute façon préférable qu’elle soit considérée un objectivisme sémantique, car elle ne distingue pas deux niveaux différents de l’être." (pp. 51-52)

    (1) Cf. B. Bolzano, [BY] : Beyträge zu einer begründeteren Darstellung der Mathematik, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1974 ; [WL] : Wissenschaftslehre, Sulzbach, 1837, in Gesamtausgabe, I. Schriften, spécialement t. 11-12, Stuttgart-Bad Cannstatt, Frommann-Holzboog, 1985-88 ; [BfW] : Der Briefwechsel B. Bolzano’s mit F. Exner, in Bernard Bolzanos Schriften (Spisy=Schriften), éd. E. Winter, t. 4, Prag, Königliche Böhmische Gesellschaft, 1935.

    (2) Sur la logique de Bolzano voir J. Sebestik, Logique et Mathématique chez Bernard Bolzano, Paris, Vrin, 1992 et J. Berg, Bolzano’s Logic, Stockholm, Almqvist & Wiskell, 1962.

  19. Cavaillès, Jean. 1946. "La théorie de la science selon Bolzano." Deucalion no. 1:195-202.

    Repris dans : J. Cavaillès, Sur la logique et la théorie de la science, Paris: Presses universitaires de France, 1947; nouvelle édition avec une postface de Jan Sebestik, Paris: Vrin, 1997 et dans J. Cavaillès, Œuvres complètes de philosophie des sciences, Paris: Hermann, 1994, pp. 653-658.

    "Bolzano considère - et manque résoudre - les mêmes problèmes de la légitimité mathématique : après les difficultés de principes auxquelless'embarrasse le dix-huitième siècle pour le calcul infinitésimal, c'est lui qui, le premier, définit correctement la limite, introduit la notion d'ensemble. D'où philosophiquement un double enrichissement de la veine leibnizienne. D'abord, l'être même de la science est soumis à critique : il s'agit à la fois de déterminer ce qui constitue une science comme telle et le moteur de son développemenL Mises à part les imperfections dues à l'époque, l'idée est décisive pour notre problème. Pour la première fois peut-être, la science n'est plus considérée comme simple intermédiaire entre l'esprit humain et l'être en soi, dépendant autant de l'un que de l'autre et n'ayant pas de réalité propre, mais comme un objet sui generis, original dans son essence, autonome dans son mouvement." (p. 654)

  20. Danek, Jaromir. 1971. "La méthodologie de Bolzano. Un thème dans la genèse de la pensée phénoménologique et de l'humanisme de notre temps." Dialogue no. 10:504-516.

    "Dans son ensemble, la WL [Wissenschaftslehre] s'articule de la maniere suivante.

    D'abord, la Doctrine fondamentale établit qu'il y a une infinité de vérités en soi, a la suite de quoi s'édifie la construction logique de la Doctrine élementaire. Les parties suivantes, consacrés a la Théorie de la connaissance, analysent les facultés qui permettent d'atteindre des vérités dans l'acte de transcendance, acte par lequel on parvient a une compréhension de certaines des vérités en soi, et dont les règles peuvent être clairement definies. C'est ce qui fait l'objet de la quatrième partie : L'Art d'inventer. Ce plan, dicté par des preoccupations logiques, suit l'ordre inverse de la gènese réelle de la connaissance, laquelle commence d'abord par l'art d'inventer, dont les règles présupposent d'ailleurs une structure a priori du monde. Mais le système logique doit être compris comme une reproduction des actes de la connaissance, ordonnés de telle sorte qu'ils menent a une synthèse méthodologique que Bolzano développe dans la Doctrine de la science proprement dite. Cette cinquième partie doit, elle-même, être une science, puisque l'examen de la structure objective de la science est aussi une objectivation rigoureuse, une synthèse de ce qui constitue le développement des diverses parties intégrantes de la connaissance." (pp. 504-505)

  21. ———. 1975. Les projets de Leibniz et de Bolzano. Deux sources de la logique contemporaine. Québec: Presse de l'Université de Laval.

    "L’idéal leibnizien d’unification des sciences commence à se concrétiser dans la Doctrine de la Science de Bolzano, théorie conçue comme une logique générale. Cette première tentative, fidèle au contenu éthique et humaniste du projet leibnizien, annonce le système qui l’exprimera d’une façon beaucoup plus large : celui d’une logique transcendantale des vérités, logique dont Husserl élargira la portée.

    La critique du panlogisme dialectique de Hegel (ou, plutôt, de ses interprétations unilatérales) souligne l’importance méthodologique de l’anhistorisme apriorique des points de départ de la philosophie bolzanienne.

    Décrit dans la « partie fondamentale » de la Doctrine de la Science, le monde idéal de l’en soi devient une base objective pour des analyses effectuées avec une précision mathématique. Même s’il est loin d’être achevé, le système de Bolzano apparaît ainsi comme une introduction à la méthode phénoménologique devant permettre de s’élever à une vision la plus objective possible du monde.

    Un penseur comme Husserl s’efforcera de dépasser les limites du système bolzanien, pour mettre davantage à jour les fondements de laconnaissance scientifique, d’une science en soi. Or, une telle recherche soulève le problème leibnizien des vérités éternelles. Existe-t-il, comme le soutenait l’auteur de la Monadologie, deux mondes radicalement distincts : le domaine des vérités éternelles et celui d’infinie variété des réalités contingentes ? Par ailleurs, la réconciliation de ces deux mondes pourrait-elle permettre de dégager des valeurs applicables à la vie quotidienne ?

    La logique n’est qu’une forme de l’effort tendant à découvrir les vérités par une méthode universelle. Les systèmes de Leibniz et de Bolzano ont été établis, thématisés et appliqués comme une logique authentique des vérités. L’explicitation contemporaine de cette thématisation se trouve dans la Logique formelle et logique transcendantale de Husserl. Cet ouvrage marque une nouvelle étape dans le développement de la logique des vérités comme fondement unifié des sciences. Cette étude n aurait-elle donc pas de fin ? Chaque époque se doit de la reprendre. À des besoins pratiques nouveaux correspondent toujours de nouvelles études théoriques.

    Le problème de la logique est donc situé dans un cadre très général.

    Le coeur de la logique leibnizienne et bolzanienne nous livre non seulement un contenu qui vise les futurs projets d’une logique transcendantale en tant que mathesis universalis de toutes les sciences, mais aussi un contenu pragmatique et éthique qui permettent notamment de nourrir une réflexion particulièrement riche sur un thème se posant avec plus de force que jamais à notre époque troublée : celui de la liberté humaine. (pp. 1-2)

  22. Dubucs, Jacques, and Lapointe, Sandra. 2003. "Preuves par excellence." Philosophiques no. 30:219-234.

    Résumé : "Bolzano fut le premier philosophe à établir une distinction explicite entre les procédés déductifs qui nous permettent de parvenir à la certitude d’une vérité et ceux qui fournissent son fondement objectif. La conception que Bolzano se fait du rapport entre ce que nous appelons ici, d’une part, « conséquence subjective », à savoir la relation de raison à conséquence épistémique et, d’autre part, la « conséquence objective », c’est-à-dire la fondation (Abfolge), suggère toutefois que Bolzano défendait une conception « explicativiste » de la preuve : les preuves par excellence sont celles qui reflètent l’ordre de la fondation objective.

    Dans cet article nous faisons état des problèmes liés à une telle conception et argumentons en faveur d’une démarcation plus stricte entre la préoccupation ontologique et la préoccupation épistémologique dans l’élaboration d’une théorie de la preuve."

  23. Duhn, Anita von. 2003. "Les remarques de Bolzano sur les couleurs." Revue de Métaphysique et de Morale:463-488.

    Résumé : "Les remarques de Bolzano sur les couleurs n’ont pas fait l’objet de recherches jusqu’à présent. Le but de cet article est de montrer que ses investigations sur les couleurs constituent une contribution intéressante à la théorie de la connaissance du XIXe siècle. Selon Bolzano, les couleurs sont des qualités secondes ainsi que des propriétés physiques et, par conséquent, elles sont des quantités mesurables. Il soutient que la perception des couleurs est réglée par des lois empiriques et il argumente que les couleurs que nous voyons sont déterminables par des concepts de grandeur."

  24. Fréchette, Guillaume. 2011. "De la proposition à l’état de choses : Husserl lecteur de Bolzano." In Catégories ontologiques et catégories logiques, edited by Seron, Denis, 45-68. Liège: Presses de l’Université de Liège.

  25. ———. 2014. "L’intentionnalité dans la Théorie de la science de Bolzano. Éléments d’une reconstruction." Methodos no. 14:1-20.

    Résumé : "Dans la réception de Bolzano, et probablement depuis les Prolégomènes de Husserl, on insiste généralement sur le fait que la Théorie de la science (1837) de Bolzano vise à développer une théorie des représentations et des propositions qui fait de celles-ci des entités logiques de plein droit, indépendantes des actes de pensée, et seules porteuses des propriétés dont traite la logique (vérité, fausseté, objectualité, etc.) L’importance accordée à cette position, souvent appelée réalisme logique (Morscher), tend toutefois à masquer d’autres aspects de l’ouvrage de Bolzano qui, sans contredire ce réalisme logique, montrent toutefois que la perspective développée par le philosophe de Prague visait aussi à rendre compte de la relation intentionnelle entre l’agent et ces entités logiques.

    Dans le présent article, je me penche sur les moyens mis en branle par Bolzano pour élucider cette relation. Dans un premier temps, j’examine le cas des représentations sans objet en soulignant le caractère intentionnel de certaines de leurs caractérisations. Dans un deuxième temps, je me penche sur le traitement réservé au jugement en relation à la proposition en soi. Dans la dernière partie de l’article, j’expose les grandes lignes de sa conception des intentions de signification sous-jacente à sa sémiotique. Pris comme un tout, ces trois cas montrent que le thème de l’intentionnalité n’est pas un épiphénomène dans la Théorie de la science, comme on pourrait le croire en partant de l’interprétation de Bolzano par Husserl, mais bien une partie constituante de l’entreprise du philosophe de Prague."

  26. Gallerand, Alain. 2012. "Les apories du concept de redondance logique chez Bolzano." Bulletin d’analyse phénoménologique no. 8:1-27.

    Résumé : "Le concept de redondance logique chez Bolzano soulève plusieurs difficultés. Il ne s’accorde ni avec la notion de représentation simple qu’il est censé expliquer, puisque Bolzano définit les individus comme des unités composées de plusieurs caractères et décrit les représentations singulières (noms propres et indexicaux) comme l’abréviation de descriptions définies, ni avec la distinction entre jugements synthétiques et analytiques, car il suppose que l’analyse d’un sujet individuel permet d’en dévoiler un à un les prédicats, comme si l’expérience ne jouait aucun rôle dans la connaissance des individus. Pourquoi Bolzano reste-t-il donc attaché à un concept aussi problématique ? Est-ce le seul moyen d’expliquer comment nous nous représentons des individus ? Nous montrerons que les apories de la notion de redondance logique témoignent de l’influence de la théorie leibnizienne du jugement, et qu’une version phénoménologiquement améliorée de la sémantique objective est néanmoins capable de les surmonter et de rétablir la simplicité de la représentation et la synthèse du jugement dans leurs droits."

  27. ———. 2013. "Bolzano et le problème du rapport intension/extension : La redondance logique vs. le principe de proportionnalité inverse." Bulletin d’analyse phénoménologique no. 9:1-25.

    Résumé : "Cet article, qui fait suite à une publication précédente (« Les apories du concept de redondance logique chez Bolzano »), poursuit un double objectif : (I) démontrer que les apories que nous avions relevées peuvent être surmontées par l’analyse des rapports extensionnels entre représentations ; (II) évaluer la contribution de Bolzano à la question classique des rapports intension/extension telle qu’elle a été posée par Port-Royal. La logique des classes, dont Bolzano pose les fondements (Théorie de la science, 2e partie, 3e section), permet en effet de dégager les lois de la redondance logique — auxquelles Bolzano ne cesse de faire implicitement référence sans en donner la formule — et de délimiter le champ d’application du principe classique de proportionnalité inverse entre intension et extension auquel déroge précisément la redondance. La critique bolzanienne de la logique de Port-Royal prend alors tout son sens."

  28. George, Rolf. 2003. "Intuitions." Philosophiques no. 30:19-46.

    Résumé : "Kant imposa au public philosophique la distinction entre sensations, intuitions et concepts. Bolzano reprit la terminologie, mais pas la substance de cette dernière. Cet article examine la critique astucieuse et détaillée qu’adresse Bolzano à Kant et présente les grandes lignes de sa théorie. Tandis que ses célèbres propositions « en soi » lui permirent de traiter avec précision des notions de conséquence, d’équivalence, d’analyticité, etc., en évitant le psychologisme logique si commun à l’époque, les intuitions font figure d’exception. Elles sont introduites en rapport direct avec l’activité mentale : les intuitions sont des pensées — les épisodes qui représentent notre conscience empirique directe — et constituent en fait la porte étroite de la philosophie de l’esprit bolzanienne."

  29. Granger, Gaston-Gilles. 1969. "Le concept de continu chez Aristote et Bolzano: étude stylistique." Les Études Philosophiques:513-523.

    "Ėtude stylistique

    La définition topologique d'un << continu >>, telle qu'elle s'est constituée dans le premier tiers du siècle [4], fournit, confrontée à la notion intuitive confuse qu'elle met en forme, un exemple excellent de structuration mathématique. Nous nous proposons seulement ici un commentaire succinct de deux tentatives antérieures de formation du concept, toutes deux insatisfaisantes, quoique profondes, et propres à montrer l'importance, jusque dans une création aussi abstraite, de l'orientation stylistique.

    Au § 38 des Paradoxes de l'infini [2], Bolzano se propose<< d'amener à une conscience claire le concept que nous désignons par l'expression << une extension continue, ou un continu>> (p. 73). Il pose alors comme conditions décisives d'une conceptualisation du continu : 1° Qu'il s'agisse d'un ensemble << d'objets simples>> (points ou << substances >>) ; 2° Qu'aucun de ces éléments ne soit << isolé >>, en un sens précis sur lequel nous aurons à revenir. En réfutant les objections que le sens commun peut invoquer, il rencontre l'idée aristotélicienne de contiguïté : << Tout point d'un continu doit avoir un autre point qu'il touche immédiatement. >> Idée dont il montre naturellement l'inconsistance dès qu'on l'applique à des éléments sans parties. Mais c'est ce qu'Aristote avait déjà vu ([1], VI, 231 a 26), dont l'analyse n'était nullement aussi naïve. Nous comparerons donc le texte de Bolzano et celui de Physique, V, 3,226 b 21 - 227 a 30 - où Aristote analyse le continu, en essayant ainsi de mettre en lumière la mise en place d'une structure dans son double rapport à l'intuition perceptive et au contexte opératoire, insistant sur la différence du choix des traits considérés comme pertinents pour la définition du concept." (p. 513)

    Bibliographie

    [1] Aristote, Physique, Oxford, éd. Ross, 1936.

    [2] Bolzano (B.), Paradoxien des Unendlichen, Leipzig, 1851 ; réédition F. Meiner, Hamburg, 1921.

    [3] Bolzano (B.), Wissenschaftslehre, Sulzbach, 1837; réédition Leipzig, 1914-1931.

    [4] BOURBAKI (N.), Topologie générale, chap. X : «Dictionnaire», Paris, A.S.I., 1949.

  30. Gyemant, Maria. 2013. "Bolzano et le psychologisme. Sur la possibilité des représentations sans objet." Philosophie:45-66.

    "Mon but, dans ce texte, sera de montrer que le débat autour des représentations sans objet est en réalité fondé sur une mécompréhension. Les adeptes d’une psychologie brentanienne (en l’occurrence Franz Exner et Kasimir Twardowski, dont je traiterai ici) utilisent le concept de représentation en un sens qui n’est pas celui de Bolzano. Pour le dire rapidement, ils entendent par représentation essentiellement l’acte psychologique de représenter, alors que ce que Bolzano nomme « représentation en soi » est de l’ordre de la signification. Les présupposés psychologistes des auteurs mentionnés sont en réalité précisément ceux auxquels Bolzano avait essayé d’échapper par sa théorie des représentations en soi. Ce qui mobilise la démarche tout entière de la Wissenschaftslehre, c’est l’idée que les propositions vraies existent en soi, que la vérité ne dépend pas du fait d’être pensée par quelqu’un, c’est-à-dire de ses occurrences psychologiques concrètes.

    Ainsi, nous voyons que le problème des représentations sans objet ne peut se poser de façon positive, non critique, que si nous nous plaçons à l’intérieur de la théorie bolzanienne en assumant les thèses qu’elle présuppose." (p. 46)

  31. Haller, Rudolf. 1987. "Remarques sur la tradition sémantique." Archives de Philosophie no. 50:359-369.

    Résumé : "L'auteur exprime son accord avec la thèse ď Alberto Coffa selon laquelle une tradition sémantique, inspirée par l'oeuvre de Bolzano, précède l'apparition de la conception sémantique dans le Cercle de Vienne, et en particulier celle de Carnap. La question principale qui se pose concerne d'une part l'antagonisme entre cette tradition et Kant et d'autre part l'opposition entre les empiristes logiques et Kant. Il semble que Carnap n'a pu se débarrasser de certains présupposés kantiens et néo-kantiens, même une fois sa base ontologique rendue physicaliste. Cette dernière position étant étrangère à Wittgenstein, on ne peut pas suivre Coffa lorsqu'il soutient que la sémantique de Carnap au milieu des années trente est voisine de la « vision du langage » de Wittgenstein."

  32. Künne, Wolfgang. 2009. "Bolzano et (le jeune) Husserl sur l'intentionnalité." Philosophiques no. 36:307-354.

    Résumé : "Dans les « Prolégomènes à la logique pure » de ses Recherches logiques (LU), Husserl rend hommage aux deux premiers volumes de la Wissenschaftslehre (WL) de 1837 de Bernard Bolzano comme un « ouvrage qui […] surpasse de loin tout ce que la littérature mondiale a à offrir en termes de contributions systématiques à la logique ». Cet article porte sur le jeune Husserl comme lecteur du chef-d’oeuvre de Bolzano, visant ainsi à contribuer à une compréhension adéquate de certains aspects des théories de Bolzano et de Husserl et de ce sur quoi portent ces théories. Je me concentrerai sur la question de savoir comment Bolzano en 1837 et Husserl autour de 1900 ont conçu les contenus des actes et états mentaux.

    Dans les sections 1 et 2, je fais état de la redécouverte de la WL de Bolzano au sein de l’École de Brentano, et en ce qui concerne le problème des représentations sans objets, j’endosse la défense de Bolzano par Husserl contre Twardowski. Dans les sections 3 et 4, je présente un aperçu de la théorie des propositions (Sätze an sich) et des notions (Vorstellungen an sich), et montre comment Husserl assimile le cadre conceptuel bolzanien dans ses RL. Tandis que Bolzano considère les propositions et les notions comme étant des objets abstraits sui generis, le jeune Husserl développe une conception des notions et des propositions en termes d’espèces. J’explique cette conception dans la section 5 et je la défends contre le dernier Husserl. La discussion la plus extensive et la plus détaillée d’une seule et unique thèse de la philosophie de la logique de Bolzano qu’on puisse trouver dans les livres et les articles publiés par Husserl de son vivant se trouve dans le dernier chapitre de ses RL. Le sujet de discussion, et la dernière section de cet article, est une affirmation courageuse, pour ne pas dire outrageuse de Bolzano qui, du moins pris au pied de la lettre, contredit tout simplement ce que la plupart des philosophes ont tenu pour acquis depuis Aristote. Les questions, soutient Bolzano, sont une espèce particulière de propositions, et donc leur vérité est susceptible d’être évaluée."

  33. Lapointe, Sandra. 2000. "Analyticité, universalité et quantification chez Bernard Bolzano." Les Études Philosophiques 455-470.

    "Introduction

    Bolzano entretient avec la tradition analytique une relation des plus intéressantes.

    Contrairement au cas de Husserl, il n'y a pas de filiation proprement dite. Outre certains passages que l'on peut trouver chez Wittgenstein et Tarski, les points d'incidence de la pensée bolzanienne sur la tradition

    anglo-américaine sont rares et sans conséquences considérables (1). Toutefois, la philosophie analytique partage avec Bolzano tant l'idée fondamentale que la logique habite au coeur de l'investigation philosophique, qu'un intérêt marqué pour les problèmes liés à la théorie de la signification et de la vérité.

    Il est donc étonnant de constater le peu d'attention qu'a reçu Bolzano jusqu'à aujourd'hui. Cette lacune dans le savoir contemporain s'explique non seulement par le destin tragique de l'oeuvre bolzanienne mais aussi par l'anhistoricisme, ou plus précisément par l' « anti-historicisme » inhérent à la philosophie analytique. Cet anti-historicisme est pourtant problématique et, depuis quelques années, des philosophes cherchent à trouver un compromis entre un philosopher purement « analytique » et un philosopher où l'histoire est la mesure de toute chose, même de la vérité(2). Mon étude qui se situe dans cette perspective se veut une contribution tant à la diffusion de l'oeuvre de Bolzano qu'à l'histoire de la philosophie analytique." (p. 455)

    (1) 1. Cf. Sebestik, 1990 ; Künne, 1997, p. 7 4 s.

    (2) Cf. Beaney, 1996, p. 2-5.

    Bibliographie

    Beaney Michael (1996), Frege : Making Sense, London, Duckworth.

    Künne Wolfgang (1997), «Die Geschichte der Bolzano-Rezeption (1849-1939) », dans Bolzano und die Ôsterreichische Geistesgeschichte. Beiträge zur Bolzano-Forschung, vol. 6, Akademia Verlag, Sankt Augustin.

    Sebestik Jan (1990), « The archeology of the Tractatus : Bolzano and Wittgenstein», dans Wittgenstein - Towards a Re-Evaluation. Proceedings ef the 14th International Wittgenstein-Symposium August 1989 Kirchberg (Austria), Wien, Hôlder-Pichler-Tempsky.

  34. ———. 2002. "Bolzano et l’anti-kantisme autrichien." In Années 1781-1801. Kant: Critique de la Raison Pure. Vingt ans de réception, edited by Piché, Claude, 263-272. Paris: Vrin.

    "Selon certains historiens de la philosophie, il y aurait une tradition philosophique distincte de la tradition philosophique allemande qui naîtrait en Autriche au xixe siècle (1). Quoiqu’il n’y ait pas consensus sur l’ensemble des paramètres qui définissent cette tradition, on s’entend pour dire que tous ses protagonistes nourrissent un anti-kantisme atypique par rapport aux différents courants philosophiques dans le reste du St-Empire-Romain-Germanique. Le but de cette étude est de contribuer à la documentation de la thèse de l’antikantisme autrichien.

    Le point de départ se situe dans le paradoxe suivant : Bernard Bolzano (1781-1848) est, de tous les philosophes autrichiens, celui qui a critiqué Kant avec le plus d’acharnement et de rigueur. Néanmoins, en 1806, il fut accusé de défendre des thèses kantiennes, une accusation assez compromettante pour qu’elle risque de lui faire perdre la chaire de sciences religieuses qu’il avait obtenue à l’Université de Prague un an plus tôt. Indépendamment de la question de savoir si cette accusation était justifiée, et selon l’avis de Bolzano lui-même elle ne l’était pas, on voudra faire lumière sur les traits du contexte culturel et politique de l’époque qui peuvent expliquer la signification et la portée de telles accusations." (p. 264)

    (1) Par exemple, Rudolf Haller, « Zur Historiographie der osterreichischen Philosophie », dans Von Bolzano zu Wittgenstein : zur Tradition der ôsterreichischen Philosophie, Vienne, Hölder-Pichler-Tempsky, 1986, p. 41-53.

  35. ———. 2003. "Introduction : Bernard Bolzano : Contexte et actualité." Philosophiques no. 30:3-17.

    "Le présent numéro est consacré principalement aux aspects de l’œuvre de Bolzano qui concernent sa philosophie de la logique et sa théorie de la connaissance. Ce thème a semblé, d’entrée de jeu, être celui le plus susceptible de susciter l’intérêt du lecteur et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, Bolzano s’est fait, dans ces domaines, le brillant précurseur de plusieurs découvertes importantes et l’étude de ses théories fournit un prétexte opportun pour faire le point sur les conceptions contemporaines, par exemple, de l’analyticité, de la conséquence, de la preuve, du nombre, etc. Deuxièmement, les liens qui se dessinent entre Bolzano et des auteurs aussi importants que Kant, Husserl et Twardowski, mais aussi Frege, Carnap et Tarski, marquent la nécessité de réévaluer certaines idées reçues en ce qui concerne l’histoire de la philosophie analytique. À cet égard, on se doit de mentionner que l’intérêt suscité depuis quelques années par la connexion historique étroite — connexion dont une certaine phénoménologie a longtemps fait fi — entre Bolzano et le fondateur de la phénoménologie a motivé un renouvellement des études husserliennes et a permis de mieux comprendre les origines communes de la philosophie analytique et de la phénoménologie. Enfin, les thèmes autour desquels gravitent les articles réunis ici témoignent d’un aspect essentiel de la contribution de Bolzano à la philosophie. Notre intention est de fournir au lecteur francophone un moyen de se familiariser avec un aspect incontournable d’une œuvre d’une richesse immense tout en montrant sa saisissante actualité.

    Dans le reste de cette introduction, je présente les éléments qui permettront au lecteur de s’initier aux grandes lignes de la philosophie bolzanienne et, en le référent aux articles pertinents, de s’orienter dans ce qui suit." (p. 3)

  36. ———. 2003. "Principe de priorité et principe du contexte chez Bolzano et Husserl." In Aux origines de la phénoménologie. Husserl et le contexte des Recherches logiques, edited by Fisette, Denis, 93-110. Paris: Vrin.

    "La proposition bolzanienne est une entité dont la fonction première est d'être « porteur de vérité». Elle se distingue, du point de vue ontologique, de l'énoncé et du jugement (conçu comme épisode mental) en ceci que tout en étant quelque chose, elle n'est pas réelle. En d'autres termes, les propositions en soi (Sätze an sich) ou, pour adopter la terminologie suggérée par Bolzano, les propositions (Sätze) ne sont situables ni dans le temps, ni dans l'espace et, par conséquent, ne font pas partie des chaînes de transactions causales. Elles doivent bien plutôt être conçues comme appartenant à un « troisième monde» (1)" p. 93)

    (1) Bolzano ne défend toutefois pas un platonisme naïf, mais bien plutôt ce qu'on pourrait appeler un platonisme instrumental. Il écrit par exemple: «L"utilité de la distinction [entre jugements et propositions] se manifeste de la manière la plus surprenante en ceci qu'elle permet à l'auteur de déterminer objectivement un nombre de concept qui n'avaient jusqu'à maintenant pas été expliqués ou qui l'avaient été incorrectement. Par exemple, les concepts d'expérience, d'apriori, de possible, de nécessaire, de contingen, de probable, etc ... à travers lesquels les disputes philosophiques les plus importantes pourront être menées à terme» (Bolzano 1839, p. 128).

    Bibliographie

    Bolzano, Bernard 1839. Dr. Bolzano und seine Gegner; Sulzbach: Seidel. (cité d'après: Bernard Bolzano Gesamtausgabe ; Stuttgart-Bad Cannstatt : Frommann-Holzboog, série 1, vol.16.1, 1989.)

  37. ———. 2008. Qu'est-ce que l'analyse? Paris: Vrin.

    Sur Bolzano voir la traduction française partielle de Théorie de la Science § 147-148 (pp. 91-96) avec commentaire (pp. 97-126).

  38. Laz, Jacques. 1990. "Un platonicien débridé? Bolzano, critique de l'intuitionnisme kantien." Philosophie no. 27:13-29.

  39. ———. 1993. Bolzano critique de Kant. Paris: Vrin.

    Suivi de Bernard Bolzano, Sur la doctrine kantienne de la construction des concepts par les intuitions, (pp. 169-182). [Appendice aux Beyträge zu einer begründeteren Darstellung der Mathematik]

    "La présente étude poursuit deux objectifs : introduire à l’œuvre philosophique, trop méconnue, de Bolzano et montrer comment cette œuvre s’est constituée en s’opposant à la philosophie de Kant.

    Nous avons délibérément limité cette entreprise à l’examen de la prise de position précoce du jeune Bolzano contre Kant, formulée dès 1810 dans l'Appendice des Contributions, qui inaugure sa critique de l’intuitionnisme. Après l’analyse des critiques formulées dans ce texte - critiques que Bolzano maintiendra toute sa vie -, nous nous contenterons d’indiquer brièvement les grands principes qui fondent cet antikantisme, maintenu dans l’œuvre magistrale de la maturité : la Théorie de la Science(4).

    (...)

    "L’Appendice des Contributions, comme son titre l’indique, n’examine en principe que la théorie kantienne de la « construction des concepts », c’est-à-dire la théorie kantienne des mathématiques. Mais si l’on sait que c’est pour Kant la réflexion sur les mathématiques et sur la géométrie tout particulièrement, qui rendit nécessaire d’affirmer l’existence d’une intuition pure en nous, base de tout l’édifice critique, l’invalidation par Bolzano de cette notion, qu’il juge logiquement contradictoire, entraîne une mise en cause de l’ensemble du kantisme.

    Ce texte résume une critique, déjà longuement mûrie, de la philosophie de Kant. Y sont fermement dénoncés les dogmes de l’intuitionnisme kantien : la philosophie des mathématiques requiert des principes que la philosophie de la subjectivité, inaugurée par le criticisme, ne saurait se concilier. Ce refus de l’idéalisme est d’abord la critique des principes d’une « esthétique» qui prétendrait fonder la science. A l’intuitionnisme aussi bien mathématique que philosophique, Bolzano oppose une philosophie des vérités en soi et de leur connexion, dont il fait le socle de toutes les régions du savoir. Les principes de cette théorie de l’objectivité scientifique - on l’a appelé le platonisme moderne - seront à la base des philosophies du XXe siècle dans leur dialogue avec la science : des penseurs aussi différents que Husserl, les membres du cercle de Vienne, Popper, Wittgenstein ou Gödel, en recevront l’héritage. Ils sont, dès 1837, définitivement exposés dans la Wissenschaftslehre de Bolzano." (pp. 10-11)

    (4) Bolzano, Wissenschaftslehre, Sulzbach, 1837.